En France, la totalité de l’alcool destiné aux carburants pour les automobiles, est produit à partir de biomasse, (betteraves sucrières ou céréales), d’où il tire son nom de « bioéthanol ». Cette composante essentielle du mix énergétique national, est obtenue en complément des cultures alimentaires et sa fabrication génère des coproduits destinés à l’alimentation animale.
La répartition entre les utilisations alimentaires et non alimentaires des matières premières agricoles est l’une des questions qui animent aujourd’hui le débat sur les biocarburants. Les enjeux liés à cette question varient selon les régions du monde et la nature des cultures destinées à l’énergie. En France, premier producteur européen d’alcool d’origine agricole, les conditions sont réunies pour s’assurer concrètement de la bonne synergie entre le différents débouchés de la biomasse utilisée pour le bioéthanol.
Moins de 1 % des surfaces cultivées en France concernées par le bioéthanol
La production française en 2010 est de 12,5 Mhl de bioéthanol, ce qui couvre la demande intérieure et une partie de celle de nos voisins. Elle requiert environ 5 millions de tonnes (Mt) de betteraves et moins de 2 Mt de céréales. Les surfaces agricoles nécessaires à ces productions représentent respectivement 15 % des surfaces betteravières et 2,5 % des surfaces céréalières françaises. Soit, toutes matières premières confondues (betterave, blé, maïs), 3 % des terres cultivées en betteraves et céréales et 1 % de la totalité des terres utilisées par l’agriculture (surface agricole utile) en France.
En savoir +
> Sur les conclusions de l’étude Ademe « Analyses de cycles de vie appliquées aux biocarburants de première génération consommés en France » concernant la question de l’affectation des sols.
> Sur les coproduits issus de la filière betterave-canne-sucre en France.
> Sur la fabrication et les coproduits du bioéthanol de céréales.
Des besoins encadrés et progressifs : 10% de bioéthanol à horizon 2020
Les quantités de bioéthanol produites et consommées en France sont liées aux objectifs d’incorporation de biocarburants dans les transports fixés par l’État, dans le cadre de ses engagements communautaires de réduction des émissions de gaz à effets de serre. La directive sur les Energies Renouvelables votée par le Parlement Européen prévoit en effet d’atteindre 10% d’énergie renouvelable dans l’énergie consacrée aux transports en 2020. Ainsi, l’objectif national fixé pour 2010 et reconduit en 2011 (7 % d’incorporation) représente une consommation annuelle française de 10,5 millions d’hectolitres de bioéthanol. Cet objectif devra progresser régulièrement à partir de 2012 pour atteindre l’objectif de 10 % d’incorporation en 2020 qui représentera environ 12,5 Mhl seulement, compte tenu de la baisse de la consommation des essences.
Avec le niveau de production actuelle, la France pourrait donc répondre au besoin français de 2020 sans être nécessairement obligée d’augmenter ses surfaces agricoles consacrées au bioéthanol, en réduisant ses exportations ou grâce à l’amélioration des rendements agricoles.
Pas de changement d’affectation des sols en France
La culture des plantes nécessaires à la production de bioéthanol n’entraîne pas en France et en Europe de modification dans l’affectation des sols, compte tenu des règles de la PAC et des exigences sur la durabilité des biocarburants de la Directive sur les Energies Renouvelables. En particulier, les tourbières ne peuvent être transformées en surfaces agricoles pour la production des biocarburants. De même, pour, la prise en compte du carbone stocké dans les prairies naturelles ou les forêts dissuade leur mise en culture. Ainsi, l’ensemble des surfaces aujourd’hui consacrées au bioéthanol sont déjà dédiées à l’agriculture.
Des matières premières qui proviennent de surfaces agricoles disponibles
La réforme de l’organisation du marché européen du sucre, voulue par la Commission européenne en 2006, a imposé une réduction de la production de sucre au sein de l’Union européenne afin de créer des débouchés pour la production sucrière des pays les moins avancés (PMA). Cette baisse de production a inévitablement conduit à une réduction des surfaces de betteraves sucrières destinées à la production de sucre. Les 600 000 hectares ainsi libérés en Europe représentent quasiment à eux seuls une surface agricole suffisante pour cultiver l’intégralité des matières premières nécessaires à la production de bioéthanol… pour toute l’Union européenne !
Des coproduits valorisés pour l’alimentation
Les différents procédés de transformation des matières premières du bioéthanol génèrent des coproduit (souvent riches en protéines) utilisés pour l’alimentation animale et correspondant à des surfaces importantes. Les pulpes issues d’un hectare de betteraves sucrières ont la valeur nutritive d’un demi hectare de céréales Pour les coproduits des céréales, c’est un tiers d’hectare qui est ainsi retourné à l’alimentation animale. On évite ainsi des importations de tourteaux de soja, en provenance notamment du Brésil (voir ci-dessous). En entrant dans la composition d’aliments pour animaux, ces coproduits contribuent à l’alimentation humaine.
De la plante au bioéthanol : une valorisation complète du végétal
Qu’elle soit destinée à la production de sucre ou de bioéthanol, la transformation de la betterave génère des coproduits qui, utilisés à des fins de distillation et en alimentation animale, permettent de valoriser intégralement la plante.
• Lors de la récolte, les feuilles et collets des betteraves sont laissés sur place pour être enfouis dans le sol, servant ainsi d’engrais.
• Les pulpes sont les chairs qui restent de la racine de betterave après extraction du sucre. Riches en énergie, en minéraux et en fibres, ces pulpes sont utilisées fraîches ou déshydratées pour l’alimentation animale, principalement des bovins.
• La mélasse, résidu visqueux recueilli lors de l’extraction du sucre, est acheminée vers les distilleries pour y être transformée en alcool.
• La vinasse est ce qui reste de la mélasse après fermentation et distillation. Riches en azote, ces vinasses sont utilisées par les agriculteurs pour l’amendement naturel des sols. Elles peuvent également entrer dans la composition d’aliments pour animaux.
=> La mise en œuvre d’une tonne de betteraves sucrières permet d’obtenir 160 kg de sucre, 500 kg de pulpes, 38 kg de mélasse et 100 litres d’éthanol.
Le process de distillation des céréales génère de son côté une famille de coproduits qu’on appelle les drêches.
• Selon le procédé le plus utilisé, la transformation de céréales (grains de blé ou de maïs) en alcool nécessite quatre opérations successives : broyage, liquéfaction-saccharification, fermentation (voir article Comment fabrique-t-on le bioéthanol ?).
• On obtient à l’issue de ces opérations un résidu, les drêches. Celles-ci se présentent sous la forme d’un mélange pâteux. Ce mélange peut être valorisé tel quel en nutrition animale sous forme humide, mais est en général séché et conditionné en granulés, ou « pellets ». Les drêches sont riches en protéines (30 à 34 %) et possèdent des qualités nutritionnelles intéressantes pour l’alimentation des animaux, bovins, volailles et porcs.
• Un autre process industriel, de type amidonnier, consiste à retirer le gluten (fraction riche en protéines des céréales) contenu dans la graine avant broyage. Les drêches obtenues dans ce cas sont moins riches en protéines (moins de 25 %). Elles sont également utilisées par l’industrie dans la fabrication d’aliments composés pour animaux.
=> La mise en œuvre d’une tonne de grains de blé permet d’obtenir 360 kg de drêches et 350 l d’éthanol (280 kg).