Grâce à un travail stratégique mené depuis plus de quinze ans, la ville de Stockholm occupe aujourd’hui la position la plus avancée en Europe dans le domaine des véhicules et carburants propres. Le succès des mesures initiées au niveau local a inspiré une dynamique nationale qui fait de la Suède le premier utilisateur européen de voitures flex-fuel avec un parc de plus de 170 000 unités en 2010.
En 1994, le gouvernement du comté de Stockholm lance le projet Clean Vehicle (Véhicule propre), initiative pionnière en Europe dont l’objectif est d’encourager le développement d’un parc de véhicules propres autour de trois énergies – bioéthanol, électrique/hybride, biogaz – en impliquant à la fois les particuliers, les administrations et les entreprises privées. La solution bioéthanol et la technologie flex-fuel s’imposent rapidement comme l’option privilégiée. En 1998, la ville conduit auprès des entreprises une vaste démarche d’information et d’évaluation des besoins pour les inciter à faire évoluer le profil de leur flotte automobile. L’initiative se concrétise, en 2001, par une commande groupée de 3 000 Ford Focus Flexifuel à laquelle le constructeur répond en accordant, sur chaque véhicule, une remise de 500 euros par rapport au même modèle en version standard.
Dès le début des années 2000, d’autres incitations à l’utilisation de véhicules propres sont mises en place dans la capitale : exonération de la Taxe Embouteillage, parking résidentiel gratuit1, subventions aux compagnies de taxis et création d’une file prioritaire à l’aéroport Stockholm-Arlanda, campagne de communication valorisant les entreprises utilisatrices, adhésion au projet européen « BEST » (BioEthanol for Sustainable Transport, voir ci-contre)… Simultanément, la dynamique s’étend au plan national.
Anticipant puis témoignant de son adhésion aux objectifs d’incorporation des biocarburants de l’Union européenne, l’État suédois met, à son tour, en place une série de mesures : dégrèvement de TVA sur les véhicules de société à énergie renouvelable (2001), réduction des taxes sur les biocarburants (2003), instauration d’un quota progressif et obligatoire de distribution de biocarburants dans les stations-service (2006), prime à l’achat de véhicules propres à hauteur de 10 000 couronnes (+/- 1 000 euros) pour les particuliers, obligation aux agences nationales d’acheter exclusivement des véhicules propres à partir de 2009…
Les conducteurs suédois plébiscitent le E85
L’impulsion donnée par ces politiques locales et nationales s’est prolongée par des mesures visant à stimuler le développement du réseau de distribution. Ainsi, la Pump Law (Loi Pompe suédoise), promulguée en 2006, prévoit que l’ensemble des stations d’une certaine taille devront, à terme, distribuer du E85. Début 2010, le réseau comptait déjà 1 571 stations-service équipées sur les quelque 3 800 que compte le pays. Côté constructeurs, les deux marques nationales – Saab, Volvo – et Ford proposent aujourd’hui une offre de plus de trente modèles flex-fuel, contre six en 2005.
L’ensemble de dispositif a eu un impact direct et positif sur l’évolution du parc automobile et sur les habitudes des automobilistes. Ainsi, la part des véhicules propres en circulation est passée de 0,3 % du parc automobile suédois en 2003 à 5 % en 2008, avec une large prépondérance des véhicules flex-fuel (4 % du parc total). Sur 254 000 voitures particulières vendues en 2008, les véhicules propres représentaient déjà un tiers des ventes, dont 70 % de flex-fuel. Toujours en pointe, la ville de Stockholm enregistre la même année un record européen : 32 % des véhicules neufs vendus sont des flex-fuel. Au 1er janvier 2010, le parc flex-fuel suédois atteignait 171 817 unités (4 % du parc national), dont 63 698 pour le seul comté de Stockholm (8 % du parc local).
Une dynamique dont le succès passe également par la forte adhésion des consommateurs. Selon les différentes enquêtes menées, les trois quarts des utilisateurs de véhicules flex-fuel se disent satisfaits de cette solution et 82 % en recommandent l’achat à leurs proches*. Grâce à la densité du réseau de distribution, le E85 représente aujourd’hui 90 % du carburant qu’ils utilisent. Quant à leurs motivations, celles-ci se répartissent à parts égales entre conscience environnementale, avantages économiques liés à l’utilisation quotidienne du bioéthanol et mesures d’incitation locales et nationales. Pour preuve, l’exonération de la Taxe Embouteillage dans la capitale a provoqué, à elle seule, une hausse immédiate de +28 % des ventes de véhicules flex-fuel dans le comté de Stockholm ! Une idée qui fait son chemin… tout en diminuant les émissions de CO2.
1. Mesure en vigueur de 2005 à fin 2008.
* Sources : Promoting Clean Cars : Case Study of Stockholm and Sweden, rapport Best, février 2009. City of Stockholm, Environment and Health Administration.
En savoir +
> Présentation des objectifs, des actions phares et des régions partenaires du programme BEST
> Politique et tableau de bord de la ville de Stockholm en matière d’environnement et de transports
http://www.stockholm.se/miljoforvaltningen
flex-fuel en 4 ans
Lancé en 2006 sur une durée de quatre ans, le projet BEST – BioEthanol for Sustainable Transport – est une initiative soutenue par l’Union européenne dont l’objectif était de faire la démonstration, exemples à l’appui, qu’il est possible de promouvoir concrètement l’utilisation du bioéthanol et d’implanter un parc flex-fuel conséquent (voitures et autobus) au niveau des collectivités territoriales. Outre la ville de Stockholm et la région nord de la Suède (BioFuel Region), Madrid et le Pays Basque (Esp), Rotterdam (PB), les régions de Somerset (GB), La Spezia (It) et Brandebourg (All) se sont engagés aux côtés de partenaires dans les domaines de la Recherche, notamment l’Imperial College of Science de Londres, et de l’industrie : producteurs de bioéthanol, motoristes, constructeurs automobiles (Ford, Saab).
Arrivé à terme fin 2009, BEST a dépassé ses objectifs et affiche un bilan flatteur avec plus de 70 000 voitures flex-fuel et bioéthanol-bus mis en circulation en quatre ans (pour un objectif initial de 10 500 voitures et 160 bus). Le Rapport final de l’expérience BEST comprend également une série de recommandations destinées aux États membres et aux décideurs des collectivités territoriales afin de tirer parti de cette expérience aux niveaux local et national.
Le rapport final BEST Experience With Biethanol Cars peut être téléchargé à partir du lien suivant : http://www.best-europe.org/Pages/Document.aspx?id=6
Eva Sunnerstedt, Responsable du département Environnement et Santé, mairie de Stockholm
L’expérience de Stockholm témoigne qu’il est possible qu’une ville, en montrant activement l’exemple, influence les orientations de tout un pays en matière de réduction des émissions de CO2 dans les transports. L’introduction de véhicules propres a commencé avec le remplacement progressif, dès 1996, des véhicules du parc municipal, et la ville possède aujourd’hui le plus grand parc d’autobus fonctionnant au bioéthanol. Mais pour aller plus loin il a été nécessaire d’instaurer une coopération étroite avec les entreprises privées, les institutions administratives et les autorités gouvernementales.
Au-delà des mesures incitatives que la ville a mis en place ou contribué à créer au niveau national, nous menons en permanence des actions d’information et de sensibilisation. Particulièrement auprès des personnes chargées des acquisitions de véhicules au sein des entreprises et administrations à qui nous proposons, en partenariat avec les constructeurs automobiles, d’effectuer gratuitement des tests de véhicules propres pendant une semaine. Notre objectif est de faire en sorte qu’en 2050 la totalité des véhicules immatriculés dans la ville fonctionnent aux carburants alternatifs.